Vœgtlinshoffen Domaine Denis Meyer et filles: des vendangeurs fidèles, année après année
Au domaine viticole Denis Meyer et filles, installé à Vœgtlinshoffen, les vendanges sont une affaire de famille. Chaque année, c’est quasiment la même équipe qui vient récolter les grappes de raisins. Et dans une super ambiance disent-ils en chœur.
Nicolas ROQUEJEOFFREIl faut remonter à l’été 1964 pour bien comprendre l’indéfectible amitié que porte Ad Kennes à la famille Meyer. Le Néerlandais était parti avec d’autres copains dans un combi Volkswagen passer des vacances dans les Vosges. Ils avaient posé leurs bardas à Gérardmer. Mais le temps, exécrable, n’était pas au rendez-vous. « On a franchi le col de la Schlucht et on est tombé sur une kilbe à Wintzenheim ! C’est là que j’ai rencontré Jean-Paul Meyer. À l’époque, je buvais le vin comme la bière ! Il m’a appris à le déguster ». Sept ans plus tard, ce même Jean-Paul, frère de Denis Meyer, fut le témoin de mariage de Ad. « Il est venu aux Pays-Bas avec plus de 40 bouteilles ». Elles ont été toutes bues durant la noce…
Ad est un fidèle vendangeur du domaine situé à l’entrée de Vœgtlinshoffen. Le Batave n’est pas le seul à toquer, au sortir de l‘été, à la porte d’une maison qui affiche fièrement son existence depuis le milieu du XVIIIe siècle. Chez les Meyer, on sait recevoir et ceux qui le savent et le vivent, généralement, signent à nouveau pour l’année suivante.
C’est le cas de Christiane, 6e année d’affilée. Miss casse-croûte, c’est son surnom, prépare l’en-cas de 9 h 30. « Dix minutes pour le préparer et deux secondes pour le manger ! », lâche, souriante, ce petit bout de femme originaire de Saint-Amarin.
Le repas du matin est à l’image de l’équipe : généreux. « Ceux qui viennent d’ailleurs apportent des spécialités de leur région ». Les Auvergnats du Saint-Nectaire, le Jurassien, du Comté, les Hollandais du fromage, l’Italien de la charcuterie… C’est son mari qui l’a incitée à venir vendanger chez les Meyer. « Les places sont chères car on est bien ici ! »
Convivial : le mot revient dans la bouche de tous les vendangeurs
Ce matin, les sécateurs ont démarré un peu plus tard que prévu. La faute à un orage qui a modifié les plans de Valérie, la benjamine des trois sœurs Meyer, la patronne dans les vignes. C’est elle qui dirige les équipes, planifie le travail des vendangeurs. Elle donne de la voix quand il faut changer de rangée, accélérer le rythme. Le groupe est expérimenté. Ça coupe rapidement.
Les gestes sont précis même chez les nouveaux, comme Audrey, infirmière à l’hôpital Pasteur. « Le coup de main, on l’a rapidement. Faut savoir faire le tri aussi entre les grappes saines et celles qui sont vinaigrées ». L’ambiance au domaine ? « C’est très convivial, y’ a pas de stress ! »
Isabelle ne dit pas autre chose. « S’il n’y avait pas une bonne entente, on ne ferait pas l’effort de venir », assure l’habitante de Saint-Amarin. Convivial ; le mot revient dans la bouche de tous les vendangeurs. Gérard, un habitant de Horbourg-Wihr, 12e année chez les Meyer, parle d’une seconde famille. « Je suis venu un peu par hasard et je ne les ai plus quittés ! »
Alors que les « petites mains » se dirigent vers une parcelle de muscat, le chasselas, tout juste coupé, rejoint le pressoir. Et là, c’est Patricia, la cadette, qui prend le relais. Elle s’occupe de la vinification tandis que Céline, l’aînée, se charge de l’administratif, des ventes et des visites au caveau. Ce jour-là, un bus est attendu. Les touristes vont découvrir la maison Meyer en pleins travaux. « On construit un nouveau caveau de dégustation », explique le papa, Denis Meyer, retraité depuis 2016 mais qui a du mal à décrocher ! Ces quelque 240 m2 abriteront également des nouveaux bureaux et un lieu de stockage. Avec vue sur la Forêt-Noire.
« À 4 ans, dans les tonneaux ! »
Le vigneron est intarissable dès que l’on parle de son métier. « À 4 ans, j‘étais dans les tonneaux avec mon père ! » Les foudres, qui accueillent les vins tranquilles, s’alignent dans le caveau. La plupart ont près de 200 ans. Le domaine Meyer vend la moitié de sa production à domicile. « Les gens adorent découvrir le lieu de fabrication du vin, veulent nous rencontrer, assure Denis. Et quand ils ouvrent une bouteille, ils voient le viticulteur ! »
Cette année, quatre semaines de vendanges seront suffisantes pour récupérer le raisin situé sur 10,5 ha (dont 4,5 en crémant) et plus de 50 parcelles à Eguisheim, Herrlisheim, Obermorschwihr, Hattstatt et Vœgtlinshoffen.
Coup de cœur du CIVA
Actuellement, Valérie et Patricia sont mises en avant par la nouvelle campagne de publicité de l’interprofession des vins d’Alsace. La « faute » à un coup de cœur pour leur crémant décroché cette année au concours de Colmar. De nombreux diplômes et trophées sont d’ailleurs affichés sur un grand mur, près du caveau. Dans cette vaste pièce, les vendangeurs s’attablent pour le repas de midi. C’est la tante Chimène et Céline qui servent les travailleurs.
Le repas, revigorant, se prend en une grosse heure avant de repartir dans les parcelles. Et le soir, rebelote pour ceux qui dorment à domicile. Ils sont une dizaine à loger au domaine. Et les places sont déjà réservées pour 2024 !